Liberté.
Qu’est-ce que la vie si ce n’est plus la vie ? Mon for intérieur m’enjoint de répondre à cette question existentielle. En bien que les parts de réponse mériteraient de venir du concert de plusieurs personnes, je peux tout de même tenter seul l’expérience.
D’abord, cette interrogation intervient à un moment où ma vie prend un tournant radical, c’est pourquoi, la question m’arrive tel une injonction, là où mes choix limités conviennent à une bien-pensance sociétale, capitaliste, individualiste, c’est-à-dire, tournés davantage vers l’individu qu’à la communauté. Constat établi, j’ai l’impression de contourner la morale quant à la vie que je mène actuellement.
En tout cas (comme les Congolais aiment débuter leurs phrases), le capital d’un Homme signe son statut dans la société. Si tel personne est fortuné ou célèbre, elle obtient tous les crédits qu’elle souhaite et parfois, ceux qu’elle n’a pas demandée ; crédit bancaire, crédit social, le crédit d’être admiré, le crédit d’obtenir des faveurs.
Ceux qu’ont les moyens thésaurisent plus de fortune, accumulent du patrimoine. Et les autres, ils affichent pleinement leurs richesses ou du moins ce qui ressemble à un symbole de richesse. Pour ainsi dire, nous participons volontiers à une consommation effrénée. A l’heure où j’écris ces lignes, à l’ère du progrès digital, dans cette époque où tout le monde peut s’exprimer derrière son clavier sans jamais trembler, nous n’avons jamais été aussi servile qu’autrefois. Cette vérité est aussi troublante que de se rappeler l’état de servitude de nos aïeux, esclaves au sens propre du terme, forcés aux travaux, soumis à la déportation, déshumanisés. La vérité, c’est que la majeure partie de l’humanité est désormais esclave d’une condition qu’elle a elle-même créée. Mais rassurons-nous, l’école de la république a omis d’enseigner à ses enfants que l’humanité a bel et bien commencer au centre du monde, à Katiopa[2].
Pour en revenir au sujet cette servitude volontaire tel que le définissait Etienne de la Boétie dans son Discours de la servitude volontaire publié en 1576, le statut d’esclave moderne fait référence à un comportement, parfois aliéné, encré dans nos habitudes. En effet, le fumeur est esclave de son addiction à la cigarette. Il est donc rendu à la servitude de fumer, et en même temps il souscrit à celle-ci.
Exceptés les riches qui peuvent se targuer de vivre librement, qu’est-ce que la vie si ce n’est de faire ce qui rend libre ? Et s’il n’y avait plus de richesse matérielle, seraient-ils libres ? Il est évident que leur argent les rend influents. Par conséquent, leur influence leur permet de faire des va et vient quand bon leur semble, partout dans le globe, en comparaison des autres, les prolétaires qui doivent payer le droit d’aller et de passer les frontières. D’un côté, les grandes déclarations internationales nous proclament libres, de l’autre côté, nos libertés sont cloisonnées. Pourtant, l’article 1er de La Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen affirme que tous les Hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits.
Pourvu que notre esprit ne soit pas influencé par les contenus en tout genre, et en particulier ceux distribués par la matrice des réseaux sociaux, la vraie liberté restera celle que l’on trouve dans son esprit. N’en déplaise à Skynet, Jarvis et l’Architecte, la psyché humaine est si particulière que notre créateur lui-même a décidé de nous laisser faire librement ; quel paradoxe.
L’antique philosophe grecque Marc Aurèle parlait de retraite intérieure pour se libérer des entraves de la société :
[3]Tu peux, à l’heure que tu veux, te retirer en toi-même.
Nulle retraite n’est plus tranquille ni moins troublée pour l’homme que celle qu’il trouve en son âme.
[2] Nom Kongo pour l’Afrique précoloniale (Kongo Katiopa, le grand Kongo)
[3] Pensées pour moi-même – Marc Aurèle, 170-180